» « Les Réseaux Pédophiles : La pièce qui accuse »
Un reportage de Anne Gintzburger, Frédérick Lacroix et Laurence Beneux
France 2000 Canal+, 90 Minutes
40 mn
Première diffusion sur Canal+ : Lundi 21 février 2005
Première diffusion sur Planète: le 23 février 2005 à 20H45
Diffusion sur RTS le 1er mars 2001
Affaire Alègre. Les dossiers Galbardi et Martinez retirés aux gendarmes.
Exit la cellule Homicide 31. Ce groupe d’enquête constituée, en juin 2000, autour de l’ex-adjudant Michel Roussel pour exhumer les meurtres de Patrice Alègre a vécu. Les juges Serge Lemoine et Fabrice Rives qui instruisent conjointement tous les dossiers criminels attribués à au tueur toulousain viennent de retirer aux gendarmes trois des cinq dernières affaires dont ils étaient encore chargés. Et pas les moindres. Il s’agit des assassinats de Line Galbardi, une prostituée frappée à mort en janvier 1992, dans une chambre de l’hôtel de l’Europe, de celui du travesti Claude Martinez retrouvé mort dans son studio un mois plus tard, et du viol d’une autre prostituée toujours en 1992.
Le procès de Marcel Lechien, 51 ans, cet instituteur accusé de viols et agressions sexuelles sur 38 enfants à l’école primaire de Cormeilles (Eure), s’ouvre ce mardi devant la cour d’assises de l’Eure à Evreux. Le procès, prévu pour durer jusqu’au 19 novembre se dérouler à huis clos. Marcel Lechien, qui, de son côté et par la voie de son avocat, demande que son procès soit public, encourt une peine de vingt ans de réclusion criminelle. L’instituteur, écroué depuis février 2001, est renvoyé pour trois viols et de multiples agressions sexuelles à l’encontre de 38 victimes âgées de 6 à 10 ans, des actes pédophiles commis entre1989 et2001 en classe de CP à l’école primaire de Cormeilles (ouest de la France), 1.100 habitants.
L’avocate d’une des sept personnes acquittées au procès pour pédophilie d’Outreau a réclamé à l’Etat une indemnisation de 500.000 euros pour le fils mineur de sa cliente en estimant qu’il était « aussi victime » dans ce dossier.
Diffusé les 12 août 2004, 8 octobre 2006 et 14 mars 2010
Dans l’esprit du public, Guy Georges est l’archétype du criminel sexuel, du tueur en série. L’affaire Guy Georges est aussi celle qui a imposé, pour le public et pour le législateur, le principe du fichage ADN. Véritable révolution dans le domaine de l’investigation policière, le relevé d’empreintes ADN permit d’identifier le meurtrier. Retour sur les faits. Automne 1997. Un homme terrorise la capitale. Coup sur coup, il vient de tuer deux jeunes femmes. A chaque fois, l’homme a suivi ses victimes dans la rue avant de pénétrer de force chez elles. Le «tueur de l’Est parisien» fait la une des journaux. Martine Monteil, directrice de la P.J. et à l’époque chef de la Brigade criminelle, revient sur les péripéties de cette enquête hors du commun.
UN ANCIEN SUBSTITUT du procureur de Toulouse, Marc Bourragué, 48 ans, aujourd’hui en poste à Montauban (Tarn et-Garonne), a été identifié comme le magistrat fantôme ayant supervisé le meurtre de Line Galbardi, une prostituée assassinée en janvier 1992 dans la Ville rose. Une énigme depuis douze ans.
En 1994, Van Geloven a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour le viol et le meurtre de deux petites filles, Ingrid et Muriel, dans la région de Perpignan. Deux meurtres d’une violence ignoble et qui auraient pu être évités. En effet, l’homme a déjà été condamné à deux reprises. Sa première condamnation remonte à 1984, pour agression sexuelle. Van Geloven ne restera cependant pas longtemps en prison. Et en 1990, il récidive. Il est cette fois condamné pour outrage public à la pudeur, mais ressort libre du tribunal. Un an plus tard, cet homme, qui se qualifie lui-même de monstre, repasse à l’acte. Cette fois-ci, il ne se contente plus de violer, mais tue également ses victimes. La justice s’est ainsi révélée impuissante à protéger les membres de la société.
Un rapport sur les droits de l’enfant de l’organisation internationale relève les » carences » de la justice française concernant les violences sexuelles sur mineurs.Urgence, carences de la justice. En des termes certes diplomatiques mais cinglants, l’ONU invite la France à changer d’attitude vis-à-vis de la pédocriminalité. » Le rapporteur tient à recommander à nouveau qu’un organe indépendant mène de toute urgence une enquête sur les carences de la justice (française – NDLR) à l’égard des enfants victimes de sévices sexuels et des personnes essayant de les protéger. » Ce point 89 du rapport définitif de l’ONU sur les droits de l’enfant (1) résume parfaitement l’opinion de Juan Miguel Petit, rapporteur spécial sur la vente, la prostitution des enfants et la pédopornographie, après la visite qu’il a effectuée en France en novembre 2002.Au moment où le procès Dutroux nous rappelle que l’inimaginable n’est pas forcément imaginaire, le rapport stigmatise la négation qui prévaut dans les milieux de la justice dès qu’on parle de réseaux pédocriminels : » De nombreuses personnes ayant une responsabilité dans la protection des droits de l’enfant, en particulier dans le système judiciaire, continuent de nier l’existence et l’ampleur » des sévices sexuels sur des enfants, et notamment ceux commis » aux fins de production de matériel pornographique » (point 81). En clair, il s’agit de viols d’enfants, photographiés, filmés et diffusés via Internet. On découvre, au cours de la lecture des 23 pages du rapport, que la brigade des mineurs de Paris » émet des doutes sur l’existence de réseaux pornographiques « , tout en reconnaissant que » nombre d’adultes sur lesquels elle avait enquêté pour possession et distribution d’images pornographiques avaient des relations sociales très influentes « . Dans ce contexte, la décision du parquet de Paris de classer sans suite l’affaire du cédérom de Zandvoort (2) choque le rapporteur de l’ONU : » Les autorités françaises ont conclu que (les images du cédérom) dataient des années soixante-dix. Toutefois, certains parents contestent cette conclusion, faisant valoir que certaines des photos contiennent des preuves montrant clairement qu’elles ont été prises récemment. » Le rapporteur spécial demande (point 88) » que le gouvernement français. transmette officiellement le cédérom Zandvoort à Interpol aux fins d’examen « .
Dans de nombreux dossiers dans lesquels des enfants sont victimes de violences sexuelles, » la plupart des juges ne sont guère enclins à entendre les enfants » (point 85), et la France se voit rappeler l’article 12 de la convention des droits de l’enfant, qui assure à tout mineur » la possibilité d’être entendu dans toute procédure judiciaire ou administrative l’intéressant « . Le constat est tel que l’ONU préconise l’affectation » des ressources adéquates à l’appareil judiciaire aux fins de la formation relative aux droits de l’enfant « . De même, le Conseil de l’ordre des médecins est invité à revoir » de toute urgence ses procédures de façon à soutenir au lieu de condamner les médecins qui font part de leurs soupçons de sévices à enfant » (point 59). Il n’a pas échappé au rapporteur de l’ONU que ledit Conseil ordinal a poursuivi une centaine de médecins » coupables » d’avoir effectué un signalement assimilé à une » dénonciation calomnieuse « . La grande discrétion accordée à la publication de ce rapport en France en dit long sur les réticences à remettre en question le dogme qui prévaut dans la majorité des prétoires : l’enfant est, a priori, présumé menteur. Ce sont les catastrophes judiciaires et humaines qui en découlent qui avait motivé la visite du rapporteur spécial de l’ONU en France, fin 2002.
Un colloque dans l’enceinte du Parlement européen.
En marge de l’affaire Dutroux, un colloque sur la pédocriminalité s’est tenu dans l’enceinte du Parlement européen à Bruxelles, le 28 janvier 2004, à l’initiative du groupe des Gauches unitaire européenne-Gauche Verte nordique. Eurodéputée communiste et coorganisatrice, Sylviane Ainardi dénonce une véritable forme de négationnisme : » La pédocriminalité est niée par beaucoup de personnes honnêtes, parce c’est quelque chose qui dérange, qui dépasse l’entendement. Ça m’a renvoyé à mon histoire familiale. Mes parents ont été déportés, mais la réalité des camps de concentration a été niée jusqu’au retour des rescapés. Parce que cela touche à l’indicible. »
Arborant ballons et vêtements blancs, 300 000 personnes submergent Bruxelles le 20 octobre 1996. Un Belge sur dix dans la rue ! Transposée en France, il faudrait imaginer une manifestation de six millions de personnes. Tous affichent leur émotion, leur solidarité avec les parents des victimes. Ils protestent contre les graves dysfonctionnements de la justice. Le dessaisissement du juge Connerotte qui privilégiait la piste du réseau donne l’impression qu’on veut étouffer l’affaire. La Marche blanche n’est pas révolutionnaire. Elle exige simplement que les institutions fonctionnent dans ce royaume curieusement fédéral, divisé par le bilinguisme.Face à une justice éparpillée en ressorts plutôt étanches, la gendarmerie unifiée sur tout le pays s’estimait-elle au-dessus des juges ? Est-ce pour cela que cette dernière n’a pas transmis à la juge compétente les informations qui auraient permis d’arrêter Dutroux un an plus tôt ? Les pandores se préparaient à l’épingler en flagrant délit dans le cadre d’un trafic de voitures. Il ne fallait pas qu’une magistrate sabote leur opération » pro-active » sous prétexte qu’elle recherchait des gamines disparues. Cette bavure s’ajoutait à la longue liste des affaires mal ou non élucidées au nom de la raison d’Etat : l’assassinat du ministre André Cools en 1991, les mitraillages apparemment aberrants de clients d’hypermarchés par les Tueurs fous du Brabant, sans oublier les affaires de corruption, le scandale Augusta qui entraînera la chute de Willy Claes, patron belge de l’OTAN. L’affaire Dutroux achève de ruiner la confiance entre les citoyens – sujets de sa majesté – et les pouvoirs publics. Mais l’électrochoc Dutroux agit au-delà des frontières belges. Jusqu’en 1996, la pédocriminalité organisée était totalement niée en Europe. À titre d’exemples, l’Humanité Dimanche avait révélé en 1986 des » ballets bleus sur minitel » et une organisation de pédopornographie sise à Paris à proximité du Sénat, dans une indifférence totale. Quand un enfant disparaissait, il s’agissait soit d’une fugue, soit d’un viol suivi de meurtre commis par un détraqué et de toute façon il était trop tard.
Bref, ce n’était jamais une priorité. En Belgique, les parents de Julie et de Mélissa, puis la grande masse des citoyens en imposant leur parole dans la rue, signifiaient aux gouvernements européens qu’ils n’acceptaient plus la désinvolture de l’État face aux crimes commis sur les enfants. Dans ce mouvement, 1996 est aussi une date clé dans la révélation des incestes et des agressions sexuelles commis sur des mineurs au sein des familles. Personne ne soupçonnait l’ampleur du phénomène, dans tous les milieux sociaux. Coup sur coup, trois réseaux sont démantelés de façon hypermédiatisée, en France : Toro Bravo, Achille, Ado 71. Il s’agit de calmer l’opinion, en démontrant qu’en France une affaire Dutroux était impossible. Pourtant sept jeunes filles handicapées mentales avaient disparu dans l’Yonne dans les années soixante-dix, sans susciter de réaction de la Justice. Le réseau franco-colombien Toro Bravo était organisé par ceux que nous avions dénoncés dix ans auparavant, derrière la galerie de photo qui jouxtait le Sénat. Après 1998, le naturel judiciaire a repris le dessus. Les réseaux ? quels réseaux ? Des fantasmes de journalistes. Des tribunaux ont jugé des affaires impliquant des dizaines de personnes comme s’il s’agissait d’individus sans liens organisés. La mondialisation et l’Internet dopaient la pédocriminalité partout, sauf en France où l’on continue d’opposer les violences sexuelles intrafamiliale (90 % dit-on) aux réseaux. Un clivage qui ne correspond plus à la réalité. Dire cela, ce n’est pas minimiser l’importance de l’inceste. Mais dans de nombreuses affaires, on retrouve des noyaux familiaux et des échanges ou des ventes d’enfants, de matériels pédopornographiques, via le Web.