Extrait 1 – Introduction rédigée par le journaliste Bruno Fouchereau, pages 32-33.
« Les tortionnaires de Samir sont en liberté. Ils continuent leurs activités de pourvoyeurs d’enfants à des pédophiles parisiens, cela j’ai pu le constater. Ils animent différentes associations d’action sociale tournées vers les mineurs. J’ai aussi rencontré d’autres enfants ayant été manipulés par Kripten. Bien qu’ils n’aient pas subi l’influence de ce réseau aussi longtemps que Samir, leurs témoignages confirment en grande partie le sien, notamment lorsqu’ils évoquent la disparition pure et simple, par l’action de cette secte, de certains d’entre eux… »
Extrait 2 – Chapitre I, page 52.
« Samir est considéré comme une bonne affaire car nul ne se préoccupe de lui: il n’est suivi par aucune assistante sociale, sa mère est alcoolique, son père vit avec une autre femme et ses frères sont presque analphabètes. Il constitue donc la proie parfaite. Il y a tout de même un problème. Samir est très indépendant et reste sur la défensive, c’est un écorché. Il faut donc le briser pour le rendre docile. »
Extrait 3 – Chapitre II, page 56.
« Il faut encore que je te dise une chose, mon petit Smir… Il faut que je te prévienne… Si jamais tu parles de Kripten, ne serait-ce qu’une seule fois, même un tout petit peu… eh bien on fera la même chose à tes frères qu’à toi. Ensuite on les tuera, on tuera ta mère, et on bouffera vos cadavres! Tu as compris, Smir Karo? »
Extrait 4 – Chapitre II, pages 61-62.
Prière qu’on lui a ordonné de se réciter:
« Samir Aouchiche est parti et ne reviendra plus en moi. Je suis Smir Karo, guerrier de l’Alliance Kripten. Personne ne me fait peur et j’obéirai toujours à mes chefs, qui sont les véritables guides de la vraie religion. L’Alliance Kripten, c’est le bien, le mal, c’est les autres, et je ne céderai pas à leurs tentations. L’Alliance Kripten, c’est le bien, le mal, c’est les autres, et je ne céderai pas à leurs tentations. Mes chefs viennent d’Uranus. Ils ont créé la race humaine. C’est eux qui feront la race des surhommes grâce au sexe, à la force et à la purification. Je suis Smir Karo de l’Alliance Kripten et je jure de toujours obéir à mes chefs. L’Alliance Kripten, c’est le bien, le mal, c’est les autres, et je ne céderai pas à leurs tentations. Amen! »
Extrait 8 – Chapitre IV, pages 83-85.
« Homosexuel, il l’est forcément, mais c’est surtout la beauté des adolescents qui l’inspire. Willy n’a rien à voir avec les brutes de Kripten, bien qu’il soit, lui aussi, un pédéraste. Il est incapable de violer un enfant ou de payer pour cela. (…) Willy vit ses tendances homosexuelles surtout dans le rêve et le fantasme. Alors, ce jeune garçon qui s’invite chez lui, ça le perturbe… agréablement. (…)
– On pourrait peut-être se coucher?
Willy en a le souffle coupé. L’enfant devance ses désirs… Mais il n’est pas question de ça… du moins tant qu’il n’aura pas levé quelques-uns des voiles qui recouvrent l’existence de ce mystérieux jeune garçon. (…) A peine Willy a-t-il débarrassé la table que Smir est déjà presque nu.
– Mais qu’est-ce que tu fais? Je n’ai même pas encore préparé ton lit!
Cette fois, c’est Samir qui est interloqué. Willy ouvre le canapé-lit du salon, installe des draps, une couette, pose une petite lampe de chevet à la tête du lit. Puis il disparaît quelques instants et revient avec du linge de toilette qu’il tend à Samir, en même temps qu’une pile de bandes dessinées.
– Tu prends du café, le matin, ou du chocolat?
– Du chocolat!
– Ca va aller?
Samir ne répond pas… Il pleure.
(…)
– Nous avons appelé chez toi et tu n’y étais pas… Alors?
– J’étais… au squat parce que j’avais raté le dernier métro.
Samir s’est entendu dire ce mensonge… Quelque chose vient d’essayer de parler à sa place, ou à la place de Smir. Quelque chose vient d’essayer de protéger Willy.
(…)
Lorsque Willy se réveille, il découvre le mot de Samir: << Je t’aime, je suis là ce soir si tu veux de moi. >> »
Extrait 9 – Chapitre IV, page 90.
« Smir, tu es notre chose et les forces de l’Alliance avec le prince ne te permettront jamais de nous quitter .Kripten est la voie de la puissance… Mais toi… tu peux devenir moins qu’une chose. Nous pourrions te tuer tout de suite, car tu n’es rien. Tu n’existes que par notre désir, notre volonté, notre force… Tu dois obéir en toute chose! Aujourd’hui est une nouvelle phase de ton initiation. Si tu franchis le pas, tu vivras… Arrache la tête de cette poule avec tes dents et nous renoncerons à vous tuer immédiatement, toi, tes frères et ta mère… Décapite cette bête et accepte ta damnation! Par ce geste, tu seras au moins quelque chose! Tu entreras dans l’Alliance! Tu SERAS l’Alliance! »
Extrait 10 – Chapitre V, page 93.
« Dix jours que Willy tourne en rond. Dix jours qu’il passe et repasse tous les lieux où il espère trouver Samir… Rien, pas une trace, il s’est comme volatilisé. (…) L’enfant l’avait pris pour l’un de ces pédophiles qui draguent les enfants en leur payant des parties. En réalité, Willy fait une enquête sur la prostitution enfantine. Et Willy est tombé amoureux de Samir. De ce chat sauvage… L’enfant s’est offert à lui sans demander la moindre contrepartie. (…) Willy se refuse à faire l’amour avec Samir tant que les choses ne seront pas plus claires… Mais le rêve s’est brisé. Samir a disparu depuis dix jours. »
Extrait 11 – Chapitre VI, page 107.
« Willy note dans son journal: << Vingt et un mars 1987, Samir parle à nouveau la nuit, ses cris me réveillent. Il pleure aussi. Je ne sais pas comment le calmer. Hier, il est resté cinq heures assis dans un fauteuil, sans dire un mot et sans bouger… >> »
Extrait 12 – Chapitre VI, page 113.
« – En août, je pars à Londres avec ma soeur Hifja. Je resterai là-bas trois semaines…
Willy bondit.
– Tu te moques de moi?
– Ben, non! Pourquoi?
– Tes histoires avec ton père et ta soeur, tu ne penses tout de même pas que j’y crois?…
– Mais je vais vraiment à Londres!
– Ca, je veux bien le croire… Mais est-ce que cela ne serait pas plutôt avec Ondathom et compagnie qu’avec ta soeur Hifja?
– Pourquoi tu es méchant? Tu sais bien que je fais ce que je peux… Qu’est-ce que tu veux? Que je me suicide? Que les autres me tuent? »
Extrait 13 – Chapitre VI, page 117.
« – Inspecteur P.?
– Oui!
– C’est Willy Marceau… Je suis très inquiet pour le jeune Samir Aouchiche!
– Qu’est-ce qu’il y a encore?
– Les gens de Kripten s’apprêtent à lui faire quitter le territoire!
– Bon, écoutez! Je n’ai pas le temps de m’occuper de vos fantasmes, mon vieux, et…
– Mais ce ne sont pas des fantasmes! Je peux moi-même vous indiquer l’endroit à partir duquel le réseau de prostitution fonctionne en ce moment même!
– Bien sûr! … Et je parie que c’est dans une soucoupe volante!
– C’est au domicile de Benoît Bernard… Celui que les enfants appellent Ondathom…
– Ecoutez-moi bien! Si vous continuez comme ça, c’est vous que l’on va coffrer! Vous ne comprenez pas? Vous voulez que je vous fasse un dessin?
(…)
Willy vient d’avoir la preuve de ce qu’il redoutait le plus: la brigade de protection des mineurs est au moins l’alliée passive des réseaux de l’Alliance Kripten. »
Extrait 14 – Chapitre VI, page 121.
« Le lendemain, à l’heure dite, Samir Aouchiche descend du train. Son visage en dit long sur son état, il boîte, ses vêtements sont sales, il est maigre…, on pourrait le croire sorti d’un camp de concentration. (…) Dans les bras de Willy, le jeune garçon s’effondre. Tous deux, péniblement, vont gagner une tête de taxis. Une fois chez Willy, Samir va dormir pendant trois jours… »
Extrait 15 – Chapitre VII, pages 124-125.
« – Où avez-vous rencontré Samir Aouchiche?
– A Paris, sur les marches d’une station de métro!
– Quel âge avait-il?
– Douze ans!
– Connaissez-vous sa mère?
– Oui! Mais cela n’a aucune importance. Cet enfant est la victime d’une secte satanique qui dissimule un réseau de prosti…
– Répondez aux questions qu’on vous pose et ne nous faites pas ch… avec vos délires d’extraterrestres… Où avez-vous rencontré Samir Aouchiche?
– A Paris, sur les marches d’une station de métro!
– Quel âge avait-il?
– Douze ans!
– Connaissez-vous sa mère?
– Oui… »
Extrait 16 – Chapitre VII, page 133.
« Dans son sommeil quasi hypnotique, Smir revoit ces heures de délire et d’horreur, ces instants partagés avec ces gens dans l’accomplissent d’actes criminels ritualisés, orchestrés et justifiés par un discours mystico-politique, véritablement ciment qui lie ces hommes et ces femmes dans un réseau qu’ils veulent indestructible. Et les images reviennent en boucle dans l’esprit de Smir. Il ne cesse de se repasser encore et encore les scènes de violence dont il a été témoin pendant les jours et les nuits qu’il a passés dans cette église désaffectée et profanée. Le visage de cette petite fille de onze ans, par exemple. Après l’avoir battue chacun à leur tour avec une sorte de bouquet de fleurs et d’épines qu’ils se repassaient, les participants sous la houlette de l’Empereur, avaient formé un grand cercle. Une jeune adolescente de seize ans, habillée d’une saie blanche avec une croix rouge sur la poitrine, chantait une lente mélopée. Smir voit encore et encore cette fillette en larmes attachée sur une table, qui appelle son papa présent dans l’assistance. Il l’entend le supplier!
… L’homme qu’elle appelle << papa >> porte aussi une saie blanche avec une cape noire sur les épaules; il a le visage couvert d’un masque rouge et, de ses yeux exorbités, il fixe l’enfant mais ne bouge pas. Brusquement, un homme bondit au milieu du cercle, grimé en monstre et le corps revêtu d’une peau de bête, et se dirige vers la petite fille. L’Empereur et trois autres personnes que Smir n’a jamais vues auparavant se mettent à réciter une sorte de prière dont chaque phrase est reprise en choeur par l’assistance. Puis l’homme grimé se jette sur l’enfant et, à l’aide d’un petit scalpel, entreprend de lui lacérer le dos. Des fines et longues blessures – au moins cinq ou six -, le sang ruisselle sur la table, puis dans des rigoles prévues à cet effet. Deux assesseurs recueillent le liquide encore chaud dans des calices pendant que l’homme grimé, après l’avoir saignée, viole la fillette.
L’Empereur, elle, s’est fait présenter le sang.
(…)
Elle boit une gorgée puis la coupe est présentée au père de l’enfant qui boit lui aussi. Enfin, tous les autres font de même. »
Extrait 17 – Chapitre VII, page 134.
« Le 21 novembre, l’audience est courte. Willy, à la surprise générale, n’évoque en aucune manière Kripten et ses réseaux, et le juge se garde bien d’aborder le sujet. Samir va essayer maladroitement de prendre la défense de Willy en expliquant qu’il avait été le seul adulte à prendre soin de lui, mais le juge le fait taire. Le verdict sera lapidaire. Willy est condamné à deux ans de prison dont huit mois avec sursis. L’avocat, maître de Felice, est sidéré. Willy s’effondre.
Après l’audience, seul, Samir rentre directement à Aubervilliers. Dans l’armoire de sa mère, il prend tous les tubes de médicaments qu’il peut trouver. Dans sa petite chambre accrochée à l’immense bloc de béton, il vide les tubes un par un, et, bientôt, le sommeil l’envahit.
(…)
Lorsque Willy apprend le geste de Samir, il croit que son coeur va s’arrêter de battre. »
Extrait 18 – Chapitre VII, page 139.
« A la fin de l’année 1991, les craintes du docteur Salavin deviennent réalité. Samir disparaît et ne donne aucune nouvelle pendant dix jours. (…) Willy ne se fait aucune illusion, Smir est retourné dans la secte (…).
Source et retranscription
« Unita », sur indotalk.xooit.com
(Merci !!)