Le Figaro Avocate séquestrée : ouverture du procès

Le procès d’une mère et de sa fille pour l’enlèvement d’une avocate, en 2009, a débuté lundi devant la cour d’assises de Paris.

Derrière le box des accusés, c’est une femme frêle qui se lève. Les cheveux gris entortillés dans un chignon, les gestes vifs, Chantal Clos comparaît ce lundi, aux côtés de sa fille, Anouk Phelut, 21 ans, pour l’enlèvement et la séquestration de l’avocate Me Pascaline Saint-Arroman Petroff, le 21 décembre 2009. La juriste avait défendu son ex-mari, Yves Phelut, lors d’une procédure de divorce très difficile à la fin des années 1990 et lui avait obtenu un droit de visite. Une injustice pour Chantal Clos qui accuse son ancien conjoint d’attouchements sexuels sur sa fille.

Incomprise, Chantal Clos semble l’avoir toujours été. Née en Algérie en 1957, elle est l’aînée d’une fratrie de huit enfants. Aujourd’hui, elle n’entretient plus que de rares liens avec ses frères et sœurs. Lorsqu’elle raconte à l’un de ses frères qu’Yves Phelut aurait agressé sexuellement Anouk, lui n’y croit pas. Elle ne le supporte pas. «Je lui ai dit que s’il restait sur cette position, il ne serait plus mon frère», raconte-t-elle d’une voix fluette mais catégorique.

C’est en 1995 que Chantal Clos a des doutes quant au comportement de son mari avec sa fille. Violent, elle n’imagine d’abord pas qu’il soit capable de s’en prendre à Anouk. Mais lorsqu’elle pose la question à la fillette, alors âgée de quatre ans, celle-ci confirme ses pires craintes. Elle se tourne immédiatement vers le corps médical, mais comme personne ne semble prendre ses dires au sérieux, elle se dirige vers la brigade des mineurs. «Là, un jeune brigadier refuse de prendre ma plainte car je suis en pleine procédure de divorce et il a peur que je m’en serve dans ce cadre. Moi, je voulais juste qu’on m’aide à protéger ma fille. J’ai autre chose à faire qu’inventer qu’un connard viole ma fille», s’indigne l’accusée.
«On a massacré mon enfant»

Mais ses plaintes débouchent à chaque fois sur un non-lieu. Le juge aux affaires familiales décide de son côté une garde conjointe des parents. «Cette juge était contre moi, explique Chantal Clos. Elle m’a dit que je voulais le beurre et l’argent du beurre. Non, je voulais juste protéger mon enfant.» Au bout de cinq ans de batailles judiciaires, elle obtient qu’Anouk voie son père dans un lieu neutre. Mais entre-temps, elle se fait condamner pour non-présentation d’enfant. La petite fille, qui voit régulièrement des éducateurs sociaux, doit revenir en permanence sur les faits. «On a massacré mon enfant», estime l’accusée, les larmes au bord des yeux et la gorge nouée.

Pour essayer de se faire entendre des pouvoirs publics, Chantal Clos crée une association de lutte contre les maltraitances faites aux enfants, ICW (International Children Welfare). «Pourquoi cet intitulé en anglais pour une association franco-française?» interroge le président de la cour d’assises. «Parce que quand je parlais du droit des femmes et de ceux des enfants en français, on ne me comprenait pas, répond, du tac au tac Chantal Clos. D’autres femmes vivaient la même chose que moi. Mais on nous prend pour des folles. La juge aux affaires familiales a même menacé de faire placer Anouk.» «Une femme, ancienne membre de votre association, déclare qu’Anouk a subi un matraquage perpétuel de votre part concernant la pédophilie», réplique le président Leurent. «On nous a tellement harcelées, on nous a tellement posé de questions, lui répond Chantal Clos. On nous a menées à l’abattoir. Comme aujourd’hui. Je suis à l’abattoir.»

De leur côté, les experts psychiatres qui ont examiné Chantal Clos pendant l’instruction divergent quant à la responsabilité pénale.

Le procès dure jusqu’à vendredi.

Laisser un commentaire