EXPLICATION Un couple d’homosexuels refuse de quitter la Thaïlande sans son bébé né par gestation pour autrui après le revirement de la mère porteuse. L’affaire donne du grain à moudre aux opposants à cette pratique controversée.
Gordon Lake, un Américain marié à Manuel Valero, un Espagnol, ont décidé de ne pas quitter la Thaïlande sans leur bébé né par gestation pour autrui.
Installés à Bangkok en attendant de trouver une solution, ils possèdent aujourd’hui la garde de l’enfant. Mais ils ne peuvent quitter le territoire en emmenant la petite Carmen, âgée de 6 mois, sans l’accord de la mère porteuse, laquelle refuse de signer les autorisations nécessaires.
Le couple qui a déjà un petit garçon également né, en Inde, par GPA et qui vit habituellement à Valence, dans l’est de l’Espagne, l’accuse d’avoir changé d’avis après avoir découvert leur homosexualité.
« Elle nous a dit qu’elle pensait que nous étions une famille normale et quand elle s’est aperçue que nous étions un couple d’homosexuel, elle s’est inquiétée pour le bien être de Carmen », a raconté Gordon Lake dans un entretien au quotidien britannique le Guardian.
La mère porteuse qui conserve l’anonymat assure avoir découvert l’homosexualité du couple le jour de la naissance de l’enfant. Elle précise que son contrat signé était en anglais, une langue qu’elle ne comprend pas. Dans un entretien à la télévision thaïlandaise, elle affirme cependant ne pas agir à cause de l’homosexualité du couple mais « parce qu’elle ne se voit pas vendre son bébé ».
De son côté, la société internationale New Life qui s’occupe de mettre en lien des cliniques et des couples ayant recours à la GPA a indiqué au Guardian que la mère porteuse connaissait le sexe des parents avant de s’engager. Un argument que réfutent les avocats de la mère porteuse.
Pourquoi la Thaïlande a dû mettre un terme au business lucratif de la gestation pour autrui ?
Cette affaire a ravivé des tensions dans le pays qui a longtemps joui d’une réputation controversée de plaque tournante florissante de la GPA, un commerce très lucratif longtemps resté peu encadré et auquel les homosexuels ont largement recours. Elle donne du grain à moudre aux opposants à cette pratique controversée.
En février, cependant, une loi interdisant aux étrangers de faire appel à des mères porteuses thaïlandaises a été votée, après plusieurs scandales retentissants. L’élément déclencheur a été l’abandon d’un bébé né trisomique par un couple australien, qui a cependant gardé sa jumelle, celle-ci n’étant pas atteinte par le syndrome de Down.
Un second scandale a défrayé la chronique dans le royaume au même moment. La police avait découvert une « usine à nourrissons » mise en place par Mitsutoki Shigeta, un riche fils d’industriel nippon. Les forces de l’ordre avaient découvert neuf des quinze enfants de l’homme qu’il avait conçu avec onze mères porteuses différentes.
Dans le cas de Gordon Lake et de Manuel Valero, la mère porteuse, uniquement connue sous le surnom d’« Oy », était déjà enceinte lorsque la loi a été adoptée. Elle a donc mis au monde l’enfant avant de le confier à ce couple. Mais elle n’a pas officiellement signé les derniers documents requis, laissant les deux hommes dans une impasse.
Olivier Tallès