Le gouvernement prépare un décret levant l’interdiction automatique aux moins de 18 ans des films contenant des « scènes de sexe non simulé ». Mais l’accumulation de plans comprenant des rapports sexuels et/ou de la violence restera réservée aux adultes.
Le régime de classification des films va être assoupli. Telle est l’annonce faite ce lundi 29 février par la nouvelle ministre de la Culture, Audrey Azoulay.
Rappelons que la décision d’interdire tel ou tel film aux moins de 12 ans ou aux moins de 18 ans échoit, en France, au ministre de la Culture. Le locataire de la rue de Valois se prononce après avis consultatif de la commission de classification des films -avis qui est suivi dans la quasi-totalité des cas.
Fin de l’interdiction automatique
Lundi, Audrey Azoulay a promis de publier un nouveau décret pour assouplir le régime en vigueur, qui a été fixé par décret en 2003. Cet ancien décret stipule que doivent être interdits aux moins de 18 ans les films « comportant des scènes de sexe non simulées ou de très grande violence ». Autrement dit, tout film rentrant dans cette catégorie doit être automatiquement interdit aux mineurs. Et si le ministère passe outre avec une interdiction seulement aux moins de 16 ans, alors il risque d’être désavoué en justice (cf. ci-dessous).
« Beaucoup de professionnels du cinéma déplorent le ‘choix binaire’ imposé au ministre de la Culture par la rédaction actuelle. Choix binaire car, si le critère objectif de la scène de sexe non simulée est caractérisé, il n’y a d’autre possibilité que d’interdire le film aux mineurs de 18 ans. Cette ‘logique binaire’ convient mal à la police du cinéma », déplore le président de la commission de classification Jean-François Mary dans un rapport remis ce lundi.
Selon Audrey Azoulay, le nouveau décret « permettra à la commission de classification d’apprécier l’effet perturbant que peut avoir un film sur les jeunes spectateurs, et d’éviter ainsi toute automaticité du classement des œuvres ».
Sexe simulé ou non?
Précisément, la ministre a promis d’engager « la réforme proposée par le rapport de Jean-François Mary ». Ce dernier propose de supprimer la référence au sexe non simulé. « Le critère de la ‘non simulation’ a évidemment perdu son intérêt au cours des récentes années. Une scène peut être tout à fait explicite à l’écran tout en ayant été simulée lors du tournage », pointe le rapport.
Pour Jean-François Mary, l’important doit plutôt être « l’effet produit sur de jeunes spectateurs ». Le rapport propose donc d’interdire désormais aux mineurs un film qui « comporte, sans justification de caractère esthétique, des scènes de sexe ou de grande violence qui sont de nature, en particulier par leur accumulation, à troubler gravement la sensibilité des mineurs, à présenter la violence sous un jour favorable, ou à la banaliser ».
Un impact économique important
Comme l’a rappelé Audrey Azoulay, la classification du film est « très importante pour sa vie économique ». Et cela à toutes les étapes de cette vie. En effet, en salles, une interdiction aux moins de 18 ans réduit d’abord le nombre de spectateurs potentiels, mais ferme aussi les portes des grands circuits comme UGC ou Pathé, dont la politique est de ne pas projeter de films interdits aux mineurs. Ensuite, certaines plate-formes de vidéo-à-la-demande comme iTunes refusent les films interdits aux moins de 18 ans.
Enfin, à la télévision, un film interdit aux moins de 18 ans ne peut être diffusé que sur une chaîne payante entre minuit et 5 heures du matin. Et les chaînes gratuites n’ont pas le droit de diffuser avant 22h00 un film interdit aux moins de 12 ans, et avant 22h30 un film interdit aux moins de 16 ans. Toutefois, par dérogation, un film interdit aux moins de 12 ans peut être diffusé à 20h30 quatre fois par an et par chaîne.
Il faut également préciser que la classification à la télévision est effectuée par la chaîne elle-même avant la diffusion du film. La chaîne se base sur la classification appliquée en salle, qu’elle reprend à l’identique, voire durcit. Après diffusion du film, la chaîne peut être sanctionnée par le CSA (Conseil supérieur de l’audiovisuel) si ce dernier estime que la classification n’était pas assez sévère.