Durant son audition, le politologue a reconnu des «attouchements» sur son beau-fils, comme le raconte Camille Kouchner dans son livre La Familia grande.
Il aura attendu trois longs mois avant d’être entendu mardi en audition libre par la Brigade de protection des mineurs. Olivier Duhamel s’était préparé méticuleusement à cette confrontation avec les policiers qui enquêtent sur des faits d’inceste à l’encontre de son beau-fils. Faits dénoncés par Camille Kouchner, la sœur de la victime, dans un livre devenu best-seller, La familia grande . Durant son audition, le mis en cause a reconnu les faits « difficilement », selon une source proche du dossier qui insiste sur l’excellente préparation d’Olivier Duhamel par son avocate. Il aurait ainsi accepté d’avouer des attouchements sexuels perpétrés pendant plusieurs mois sur «Victor », le fils de Bernard Kouchner et d’Évelyne Pisier. Selon nos informations, il aurait alors confié aux enquêteurs qu’il s’agissait d’une relation consentie, voire d’une histoire d’amour partagée. Un peu comme celles qui peuvent avoir cours entre deux adolescents.
En revanche, le politologue aurait fermement nié avoir soumis la victime à des fellations. De quoi faire dire à de bons connaisseurs du dossier que ce démenti pourrait permettre d’éviter au politologue que ces faits soient qualifiés de crime de viol, restant ainsi dans le giron du délit d’agressions sexuelles.
Tsunami médiatique
Par ailleurs, Olivier Duhamel aurait situé les premiers attouchements lors d’un voyage à Rome, mais il serait resté très flou lorsqu’il lui a été demandé de donner des dates précises. Si ce n’est que les faits se seraient selon lui déroulés en totalité avant 1990, date limite de leur prescription. Il est loin de s’agir d’un détail. Le parquet de Paris, qui a ouvert une enquête préliminaire le 5 janvier – avant même que le livre de Camille Kouchner ne soit disponible sur les étagères des librairies – cherche justement à vérifier deux points importants du dossier : d’une part, retrouver d’éventuelles nouvelles victimes et de nouveaux faits ; d’autre part, s’assurer que la prescription est bien acquise. Elle avait été une première fois décrétée par le parquet, en marge de la mort mystérieuse de Marie-France Pisier en 2011. «Victor » ayant eu 18 ans en 1993, la prescription était acquise depuis 2003. C’est ce calcul qui aurait justifié un premier classement, indépendamment du refus de la victime de porter plainte. Lors de son audition en janvier dernier, la victime est revenue sur cette position et s’est décidée à le faire, en janvier 2021.
Pour le parquet de Paris, cette enquête préliminaire a un autre mérite. Celui de permettre au mis en cause de s’exprimer alors que l’affaire s’est d’emblée transformée en tsunami médiatique en France, obligeant le politologue à se démettre immédiatement de toutes ses prestigieuses fonctions et de son rôle d’éditorialiste sur différentes radios et chaînes de télévision, tant l’émotion a été forte. Elle aura débouché sur un mouvement de libération de la parole sans précédent concernant les affaires d’inceste, sujet jusque-là tabou malgré leur nombre important.
Avant de convoquer Olivier Duhamel, les policiers ont choisi une stratégie classique en entonnoir. Durant tout ce premier trimestre se sont succédé dans les bureaux de la Brigade de protection des mineurs tous les protagonistes et témoins de cette affaire, l’entourage proche et familial. La première à avoir été auditionnée n’étant autre que l’auteur du livre par qui le scandale est arrivé.