AFP / Handicap.fr Moussaron : 9 plaintes classées, un collectif proteste !

Un collectif d’associations a protesté le 4 mai 2015 contre le classement sans suite de neuf des dix plaintes qui visaient un institut pour enfants et jeunes lourdement handicapés dans le Gers, la justice n’ayant pas trouvé de preuves de maltraitance ni de détournements. L’institut médico-éducatif (IME) de Condom, « Maison d’enfants de Moussaron », s’était retrouvé en 2013 au coeur d’une vive et douloureuse controverse sur les conditions dans lesquelles étaient accueillis et traités ses pensionnaires, atteints de déficience intellectuelle ou de multiples handicaps.

Une seule plainte encore en cours d’instruction

Dans un communiqué, le collectif qui portait les accusations (Association des paralysés de France dans le Gers, CGT, ex-salariés, familles) s’est dit « très étonné que sur dix plaintes, aucune poursuite judiciaire ne soit engagée », alors qu’un rapport de l’Agence régionale de santé (ARS) avait dénoncé en octobre 2013 une situation de « maltraitance institutionnelle ». Une seule des cinq plaintes déposée par des familles, pour des soupçons de maltraitance, reste en cours d’instruction chez un juge à Auch. Trois autres plaintes de parents ont été classées car « aucune infraction pénale n’a été découverte », a confirmé à l’AFP le procureur de la République d’Auch, Pierre Aurignac. « Il aurait fallu qu’on ait des preuves de violences volontaires, de sévices sur enfants, de privation d’aliments ou de soins, mais tout cela ne m’a jamais été indiqué, on est dans quelque chose qui est beaucoup plus flou », a-t-il dit. Le procureur a cependant relevé que « la structure ne correspondait pas au fonctionnement nécessaire pour ces enfants. Il y avait des choses qui, du point de vue administratif interne, ne correspondaient pas aux standards ».

De « graves dysfonctionnements »

Fin 2013, l’établissement avait été placé sous l’autorité d’un administrateur provisoire pour remédier aux « graves dysfonctionnements dans les conditions d’installation et de fonctionnement » constatés lors d’une visite inopinée. Une autre plainte a été abandonnée en raison de la « prescription des faits » présumés, remontant à la fin des années 90. La justice a également classé sans suite la plainte pour « harcèlement moral » déposée par une salariée, licenciée depuis, qui avait dénoncé ce qu’elle appelait « des pratiques d’un autre âge » et « prises en charge indignes« . Trois autres plaintes de salariées ont été classées pour « infraction insuffisamment caractérisée« . Enfin, la plainte déposée en 2014 par la ministre déléguée aux Personnes handicapées, Marie-Arlette Carlotti, pour abus de bien social et abus de confiance, a également été classée (article en lien ci-dessous).

Des problèmes de « gestion à l’ancienne »

« Il n’y a pas d’infraction reprochable aux époux Doazan (le couple de médecins qui dirigeait l’établissement de 1971 à 2012, ndlr), pas d’enrichissement personnel« , a conclu le procureur, évoquant seulement « des phénomènes de gestion à l’ancienne, avec confusion de patrimoine entre les différentes sociétés« . « Dans l’enquête, il est clairement dit que le couple Doazan a souffert de ces accusations. (…) Je n’ai strictement rien à leur reprocher sur le plan pénal en l’état actuel des enquêtes« , a insisté le procureur. « Les familles n’ont-elles pas souffert en découvrant l’état sordide du bâtiment dans lequel était pris en charge les enfants?« , a de son côté écrit le collectif. Une annexe ancienne et sous-équipée – où la moitié des pensionnaires était logée – avait été fermée après les dénonciations, alors que l’Assurance maladie finançait le fonctionnement de l’internat 290 euros la journée par pensionnaire (plus de 8 000 euros le mois).

La ministre saisie

« Des questions restent en suspens« , a commenté à Paris le « comité d’entente » formé par 70 associations nationales représentatives des personnes handicapées et parents d’enfants handicapés (Unapei, APAJH, APF, FNATH…), dans un communiqué. Ce comité a saisi la secrétaire d’Etat Ségolène Neuville en jugeant que l’affaire pose la question « des contrôles des structures par les autorités, en matière de mise en place de politiques de bientraitance« .

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