La Dépêche Affaire Alègre. Les étranges confessions d’un magistrat décédé

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Affaire Alègre à Toulouse – En 2003, alors que les prostituées témoignent chez les gendarmes, Pierre Roche est mort dans des conditions que ses enfants jugent suspectes.

Charles Louis-Roche et sa sœur Diane en sont convaincus. La mort de leur père, Pierre Roche, président de chambre à la cour d’appel de Montpellier, décédé le 22 février 2003 à l’âge de 60 ans, n’a rien de naturelle. Forts des confidences du défunt recueillies avant sa disparition, les deux enfants de ce magistrat à la vie privée très agitée font aujourd’hui le lien entre l’itinéraire de Pierre Roche et l’affaire Alègre qui a éclaté deux mois plus tard. Pour eux, leur père a été victime du réseau dans lequel il assouvissait lui-même ses pulsions sexuelles. Sadomasochisme, tortures voire crimes rituels… Ces accusations mêlant une nouvelle fois, sans preuves formelles, perversions et sociétés secrètes, sont relayées depuis quelques semaines sur le site internet « Les Ogres », hébergeant notamment les prises de position de l’humoriste Dieudonné. Nous avons rencontré Charles-Louis Roche qui se dit « prêt à tout pour faire entendre la vérité ».

La première fois que le nom de votre père est sorti dans les médias, c’était au moment où sa seconde femme est apparue dénudée sur un site internet…

C’était en août 2002 et ces images ont d’abord surgi sur un site anglo-saxon avant d’être reprises en France. Présentées comme les photos pornos de la femme d’un haut magistrat français, elles ont ensuite été publiées dans le magazine Entrevue et France Soir s’est fait l’écho de l’affaire. Tout a dérapé quand mon père nous a accusés avec ma mère, dont il a divorcé depuis 20 ans, d’être à l’origine de ces révélations.

Des accusations qui vous ont valu une condamnation…

Nous avons été jugés en première instance à Mende, en Lozère, dans le ressort judiciaire où exerçait mon père dans des conditions surréalistes et l’appel sera tranché au mois de janvier. Mais nous sommes complètement étrangers à cette manipulation. Pour moi, c’est mon père lui-même qui a instrumentalisé ces photos pour obtenir un divorce à son avantage. Le tout en jouant les vertueux offensés face à sa seconde femme, une ancienne prostituée. Il voulait s’en débarrasser, mais son stratagème s’est retourné contre lui quand les sites internet ont échappé à son contrôle.

Vous prétendez qu’il a reçu des garanties de la chancellerie et de l’ancien Garde des Sceaux Dominique Perben ?

Quand le scandale des photos a éclaté, il a craint pour sa carrière. Il pensait être traduit devant le Conseil supérieur de la magistrature et mis à la retraite. Il était terrorisé. En même temps qu’il nous accusait ma mère et moi, il a fait passer un message dans les milieux très spéciaux qu’il fréquentait. En substance, « si je tombe tout le monde tombera avec moi ». C’est là qu’il a obtenu une garantie écrite de la chancellerie sur son sort. Une lettre du directeur des affaires judiciaires dont nous pouvons prouver l’existence puisqu’il y est fait référence explicitement dans le procès qui m’est fait.

Comment expliquez-vous que ce père qui vous a accusé de le salir vienne se confier à vous et votre sœur quelques semaines avant sa mort ?

Il n’avait pas imaginé que la publicité faite autour de lui déclencherait une grosse inquiétude dans les cercles dont il se réclamait. Il était sous pression et se disait menacé. Entre l’été 2002 et sa disparition en février 2003, il est venu nous voir trois fois à Toulouse. La première fois, je ne l’ai pas reconnu, il était défait méconnaissable. Il nous a fait, à ma sœur et à moi, le récit de ses turpitudes comme s’il voulait se repentir. Il nous a parlé des soirées regroupant des gens d’influence, des pratiques rituelles avec célébrant, des scarifications, des tortures consenties ou pratiquées sur des cobayes, SDF, étrangers sans existences légales. Il avait un énorme sentiment de culpabilité et craignait pour sa vie.

A-t-il été question à ce moment-là de Patrice Alègre ?

Mon père n’a jamais cité le nom de Patrice Alègre mais ceux de personnes fréquentant ces cercles, des amis de la magistrature que ma mère a également côtoyés lors d’invitations à la maison. Des noms prononcés au même moment par les prostituées devant les gendarmes de la cellule Homicides 31. Nous savons qu’une partie de ce qu’ont raconté ces femmes est vraie. Elles ont peut-être exagéré sous la pression mais les pièces du puzzle sont en place. Si l’affaire Alègre a éclaté c’est parce qu’il y a une corrélation avec ce qu’à vécu notre père. L’affaire Alègre est un écho.

Pourquoi dans ces conditions ne pas avoir fait état plus tôt des confessions de votre père quand l’affaire Alègre a rebondi ?

La dernière fois qu’on l’a vu il nous a dit « vous êtes mes petites assurances ». Il nous a fait jurer le silence. Nous avons ensuite appris sa mort par la bande. Nous, ses enfants. Son corps avait été incinéré sans notre permission et puis il y avait la procédure judiciaire contre nous. Aujourd’hui, nous sommes persuadés que notre père a été tué et nous irons jusqu’au bout pour avoir la vérité.

Bizarrement votre avocat, Me Collard est aussi celui de Patrice Alègre ?

Nous avions déjà un avocat Me Hoephner, mais l’an dernier j’ai reçu un coup de fil de Me Collard qui nous a dit qu’il souhaitait nous défendre gratuitement. Nous n’avions de toute façon pas les moyens de nous le payer. Il nous a dit qu’il se paierait sur la publicité faite au dossier. Peut-être pour nous contrôler ? Pour moi, c’est en tout cas la preuve que ces dossiers sont très liés.

Recueilli par G. -R. Souillés

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