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Pedopolis Outreau 3 (jour2) Compte rendu + interview de Jonathan Delay, Maitre Forster et Jacques Cuvillier

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Outreau 3 (jour2) Interviews de Jonathan Delay… par pedopolis

(Si la vidéo ne s’affiche pas cliquez ICI )

La deuxième journée du procès Outreau était très attendue par le public et les journalistes.

Devant une salle remplie, Jonathan Delay, 21 ans, troisième de la fratrie Delay, était en effet entendu à la barre.

2-jonathan delay-20-mai-2015«J’étais dans le box des accusés, et je n’en suis pas sorti »

Fatigué par ces journées éprouvantes, Jonathan est resté calme et posé pendant près de quatre heures .

Placé début 2000 à Outreau, dans une famille d’accueil, il a expliqué qu’il n’avait plus eu, dès lors, de réels contacts avec ses frères, placés dans d’autres familles. « Un placement brutal, expliquera t-il, où on l’a séparé de ses frères avec qui il aurait aimé rattrapé « le temps perdu ».

Agé alors de 7 ans, il avait peu à peu alerté le couple, par son comportement, des violences qu’il subissait de la part de ses géniteurs. La famille d’accueil avait déposé un signalement fin 2000, mais Jonathan continuait de se rendre chez ses parents les week-ends et pendant les vacances où les sévices insupportables qu’il subissait avec ses frères ne cessaient pas.

Ce n’est que lorsque le juge des enfants décida, 5 mois après le signalement, de suspendre les visites que le calvaire cessa.

« J’ai le souvenir d’avoir été violé, mais la loi ne me permet pas de dire par qui, car ils ont été acquittés », a répété Jonathan au président et aux avocats de la défense qui lui posaient la question.

daniel legrang  mai 2015« Daniel Legrand était là », a-t-il répété, expliquant qu’il avait des images, mais ne pouvait se souvenir de faits qu’il pourrait décrire précisément.

Il avait rapporté spontanément les faits qu’il vivait à l’époque à l’âge de 7 ans, et bien avant.

Aux deux procès de St Omer et de Paris, il avait tenté de se défendre, a t-il expliqué, « mais vous connaissez les conditions du déroulement de ces procès où les enfants étaient placés dans le box des accusés, et sur les deux avocats commis par le Conseil Général pour les douze petites victimes, un était quasiment inexistant ».

jonathan delay« Vous le savez, vous étiez là, avec vos dizaines autres confrères », a rappelé Jonathan. Mais on ne m’a pas demandé de désigner les coupables à ce moment là.

Donnez-moi l’occasion de revenir sur les acquittés, aujourd’hui à 21 ans, et je vous assure qu’il y aura de quoi débattre » a lancé Jonathan aux avocats de la défense qui le pressaient de questions pour qu’il détaille des circonstances de viols par Daniel Legrand.

« Il était là, c’est certain », s’est-il contenté de répéter à Me Berton pour qui« le sens de ce procès est de désigner des agresseurs ». Brèche dans laquelle Jonathan refuse de plonger.

Une jeunesse brisée, entre foyers belges et écoles de la rue

« Après le procès, j’ai été placé en foyer en Belgique, a-t-il appris au public. Une ancienne maison de redressement transformée en centre d’accueil, et gérée par des légionnaires aux méthodes violentes dans laquelle je n’avais rien à faire ».

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« On m’en a viré la veille de ma majorité. Quand j’ai touché mes indemnités de 30 000 euros – dix fois moins que les acquittés – j’ai tout dépensé, j’ai aidé des gens. Je me suis retrouvé à la rue, j’ai vécu dans des centres pour SDF, j’ai connu la psychiatrie… ».

Aujourd’hui, je me reconstruis, j’ai des projets d’avenir, je me bats. « Être à ce procès est un soulagement sans l’être », a poursuivi Jonathan qui a expliqué qu’il n’avait été prévenu de sa tenue qu’un an et demi plus tôt, par un courrier officiel, sans qu’aucun de ses deux avocats ne l’en avertisse, ni ne l’informe de la possibilité de le faire.

Certes, il avait bien accordé, en 2013, un entretien au Parisien dans lequel il affirmait qu’il n’irait pas à ce procès qu’il craignait de voir se transformer en « une nouvelle mascarade » dont il n’avait pas besoin. Mais la rencontre fortuite avec Maître Reviron a changé la donne. L’avocat a écouté la parole de ce jeune adulte et l’a cru.

Loin de « mentir pour obtenir réparation en saisissant cette aubaine juridique », hypothèse soulevée par l’avocat général, Jonathan n’attend qu’une « justice juste », une écoute.

Isa T.

Photos: France Info, France BleuL’Express, La voix du Nord

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Relevé de cette audience avec Twitter

- Compte rendu de cette audience par « Outreau, une Mise au Point »

- Planning du déroulement du procès

2 réflexions sur « Pedopolis Outreau 3 (jour2) Compte rendu + interview de Jonathan Delay, Maitre Forster et Jacques Cuvillier »

  1. À noter que le juge et la défense ont beaucoup insisté (à juste titre) sur la notion de souvenirs, en abordant la question comme s’il s’agissait de « souvenirs de vacances ». Malheureusement, personne n’est là pour venir expliquer le fonctionnement des mémoires traumatiques devant la Cour. Jonathan parle bien de flashs, d’images, mais il a du mal à reconstituer un déroulement chronologique d’une scène en particulier car c’est un puzzle à reconstituer, et il semblerait que la défense et le juge ignorent totalement cette facette de la mémoire. Peut-être qu’un expert viendra expliquer cela plus tard durant le procès, mais les avocats de Jonathan auraient aussi pu le soutenir en mettant en avant cette notion de mémoire traumatique, pouvant remonter des années plus tard sous forme de flashbacks avec des images et pas forcément une scène de vie entière.
    Jonathan a déclaré: « je parle d’images que j’ai dans la tête, je ne parle pas de souvenirs », ou encore : « Présentez-moi la personne qui me permet d’aller dans mes souvenirs, moi, j’en suis incapable. »

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