C’est ainsi, dans cette histoire d’Outreau : quand on croit que c’est fini, ça ne l’est pas encore. Cette fois, c’est la Cour Européenne des Droits de l’homme qui est saisie d’une requête. Rien qui puisse remettre en cause les condamnations et acquittements prononcés jusqu’au début du mois de juin. Mais la France pourrait être condamnée pour n’avoir pas satisfait aux principes du procès équitable, et/ou à celui du délai raisonnable.
Pour le premier, c’est Yves Bot, ex-procureur général de Paris, qui est visé, pour le second, ce sont les douze années qui se sont écoulées entre la fin de l’instruction et le procès de Daniel Legrand qui s’est déroulé ce mois de juin à Rennes. Dans les deux cas, la condamnation est tout à fait possible.
A Strasbourg, au siège de la Cour européenne des Droits de l’homme, cette procédure s’appelle Delay contre France et porte le numéro 58594/14. Le Delay dont il s’agit ici n’est aucun des trois frères qui étaient partie civile au procès de Rennes, mais le quatrième et dernier fils de Myriam Badaoui et Thierry Delay, Dylan.
Il serait actuellement au Maroc, selon Jonathan, mais c’est bien lui qui a déposé cette requête visant d’abord le procès de 2005 en appel, devant la cour d’assises de Paris. On se souvient qu’au terme du réquisitoire, quand Yves Jannier eut terminé de requérir les acquittements des six accusés, son supérieur, Yves Bot, alors procureur général de Paris, s’était invité au milieu du prétoire. Quelques minutes, seulement, après la fin de l’audience.
Curieuse idée, se disait-on, mais on n’était pas au bout des surprises du chef. Dans un point presse manifestement préparé, M. Bot présenta des excuses aux époux Lavier, à Dominique Wiel, Alain Marécaux, Daniel Legrand (fils) et Thierry Dausque, qui étaient encore accusés. Non seulement, ils n’étaient pas acquittés, mais la cour d’assises n’était pas partie en délibéré. Celui-ci devait se tenir le lendemain.
La requête de Dylan Delay – qui avait neuf ans, à l’époque – suggère que le principe de procès équitable peut avoir été bafoué par ces excuses de la justice, alors que les jurés étaient probablement sur le point de rentrer chez eux. Ils peuvent en avoir eu vent le soir-même, voire le lendemain matin – en tout état de cause avant d’entrer en délibération. Dylan Delay – et les gens qui « soutiennent sa démarche », comme on dit à Strasbourg – estime que les jurés peuvent avoir été influencés, au moment de prendre leur décision.
C’est tout à fait plausible, même si une fois encore, c’est surtout le cours du procès, pendant lequel ce dossier s’était de nouveau totalement effondré, qui a influencé les juges.
Par ailleurs, la même requête vise le délai d’audiencement du procès de Daniel Legrand qui s’est tenu à Rennes, de fin mai au début du mois de juin. Et c’est également vrai qu’il est anormal, ce délai : douze ans entre la fin de l’instruction et le début de l’audience devant la cour d’assises des mineurs. Mais pour une fois, c’est la raison qui commandait d’attendre, voire d’oublier.
Si les condamnations de certains et l’innocence des autres ne peuvent en aucun cas être remises en cause, c’est la justice française, qui peut ici être condamnée à verser une amende. M