(Jacques Thomet) Onze ans après leur fuite en Suisse, Camille soutient sa mère Priscilla Majani et accuse toujours son père

Dans une lette envoyée de Suisse où elle réside, et lue vendredi devant le tribunal de Toulon qui a condamné sa mère, Priscilla Majani, à 5 ans de prison fermes et 25.000 euros d’amende, sa fille Camille a rappelé les violences qu’elle affirme avoir subies de son père Alain Chauvet, et souligné que le jour de sa fuite en Suisse à l’âge de 5 ans avec sa mère en 2011 fut « le plus beau de sa vie ».
Son poignant témoignage n’a pas été pris en compte par la juge unique, qui a condamné la maman à ces peines pour non représentation d’enfant et dénonciation calomnieuse, sans laisser son avocate terminer sa plaidoirie en vertu d’une jurisprudence de 1951, et en refusant de parler dans le micro, ce qui rendait ses interventions pratiquement inaudibles. Le recours à un juge unique en correctionnelle est réservé aux délits mineurs, comme les excès de vitesse ou vols à l’étalage, ce qui n’était pas le cas ici.

Après un classement sans suite de sa plainte pour inceste contre le père en février 2011, Priscilla Majani avait pris la fuite avec Camille, avant d’être retrouvée en Suisse par la police en février dernier puis extradée vers la France. Camille, scolarisée près de Lausanne depuis ses cinq ans, avait été épargnée de cette expulsion.

« Je me souviens du jour où j’ai parlé de ce que me faisait mon père, je l’ai d’abord dit à ma grand-mère, je l’ai ensuite dit à ma mère, je me souviens de son état de choc au moment où je lui parlais, écrit Camille dans cette lettre. J’ai commencé à parler des choses moins graves, puis des abus sexuels. Ce dont je me souviens particulièrement avoir dit, c’est : ‘il a mis son zizi dans le trou des fesses’, car c’est à ça que les gens à qui je parlais étaient le plus choqués. J’ai été heureuse de pouvoir être entendue (par le tribunal). Mon père me disait toujours ‘ne parle à personne, sinon tu vas voir ce qui va arriver à ta mère’.

« Ma mère et moi sommes allés voir des policiers, je leur ai dit la même chose que ce que je disais à ma mère. Ce que je n’aimais pas chez le policier qui m’interrogeait, c’est qu’il rigolait quand je lui disais ce qu’il se passait. Il rigolait comme si je lui faisais une blague, comme si c’était drôle. Ce que je ressentais, c’est que je n’étais pas crue.(…)
« Je me souviens avoir été énormément soulagée lors du départ. Je me suis sentie pour la première fois en sécurité. (…) Je n’ai jamais été oppressée ni contrainte de force à suivre ma mère. Si j’avais voulu retourner vivre chez mon père, j’aurais pu le faire depuis longtemps, or je n’en ai plus jamais eu envie, car mon père est une crainte pour moi. (…) Dans l’un des films (d’horreur que son père demandait à Camille de regarder), une femme se faisait couper la tête, et il me disait que si je parlais (de tout ce qu’il me faisait), c’est ce qui arriverait à ma mère. Je me souviens d’une fois où il a tenté de lui faire du mal en voulant la blesser avec une voiture. Dans mes souvenirs elle se trouvait allongée sous la voiture, et lui m’a mis sur le siège arrière en menaçant qu’il allait démarrer. »
Camille s’en prend également à la justice de Toulon. « Pour moi, la justice qui a traité cette affaire il y a onze ans n’a pas effectué son travail et n’a pas été juste. J’aurais voulu être crue, tout comme ma maman qui m’a crue quand je lui ai révélé les crimes commis par mon père. (…) La justice française n’a pas été capable d‘appliquer une vraie justice. (…) Que l’on accuse ma mère de menteuse est incompréhensible pour moi. C’est moi qui lui ai parlé des horreurs commises par mon père, je me souviens de ces moments. Je sais que tout ce que j’ai dit il y a onze ans est véridique. (…) Je ne comprends pas pourquoi la justice décide de fermer les yeux sur ça, en considérant que ma mère a commis un crime, dans le but de me protéger avant tout, alors que les crimes de mon père sont bien plus graves.
« J’espère très fortement qu’elle va être reconnue innocente et qu’elle va être libérée. Je souhaite pouvoir vivre avec elle, ici en Suisse, et retrouver un mode de vie normal à ses côtés.
Aussi, je refuse de devoir revoir Alain Chauvet, et de retourner vivre avec lui ».

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