Le procureur de Paris et la division de la Commission européenne chargée des affaires intérieures, présidée par Cécilia Malmström, devraient être saisis, cette semaine, d’une plainte de Me Norbert Tricaud concernant le groupe France Télécom-Orange (FT). Cet avocat parisien, défenseur d’Yves Garcia, un cadre de la direction Afrique/Moyen-Orient et Asie (AMOA) du groupe français de télécoms et délégué syndical, entend alerter sur des « présomptions de malversations comptables graves ». Auditeur interne à FT alors qu’il avait des responsabilités dans les filiales centrafricaines et équato-guinéenne, Yves Garcia, qui agit en qualité de témoin direct, attire depuis plusieurs mois l’atention de sa hiérarchie sur des comportements qu’il juge « anti-déontologiques ». Concernannt la société la société Getesa, filiale de FT en Guinée équatoriale, il s’appuie sur un audit effectué par Deloitte en 2009, dont les conclusions sont accablantes. Pour cette seule année, le cabinet note « un dépassement budgétaire de 2.5 milliards F CFA sans autorisation » ; « un dispositif interne de contrôle inexistant » ; « des factures d’achat dont les montants sont nettement supérieurs aux bons de commande » ; « des détournements ou vol des stocks marchands », etc. D’autres soupçons concernent les filiales en côte d’Ivoire, au Niger et en Centrafrique. Yves Garcia demande la réalisation d’un audit sur l’utilisation des subventions que l’état français, actionnaire de FT à hauteur de 26.97%, a versé ces dix dernières années à l’opérateur. En vain. Comme seul réponse, il a reçu de la direction des ressources humaines de FT une menace de sanction pouvant aller jusqu’au licenciement pour « accusations mensongères, atteinte à l’image de FT, discrédit et atteinte à la réputation de (sa) hiérarchie ». Le 29 novembre 2012, Norbert Tricaud a interpellé la Cour des Comptes. Plusieurs courriers ont par ailleurs été adressés au patron de FT, Stéphane Richard. Faute de recour, Me Tricaud veut faire monter la pression d’un cran en s’adressant au procureur de la République et aux instances européennes.
La société France Télécom-Orange, dont l’intégrité et la probité ont été gravement mises en cause dans l’article intitulé « Guinée Equatoriale les gros pépins d’Orange« , publié en pages 60 et 61 du n° 3210 du magazine L’Express, daté du 9 janvier 2013, entend apporter les précisions suivantes:
Affaire de moeurs, guérilla judiciaire interne, contentieux avec les autorités de Malabo: l’aventure du géant des télécoms dans un pays qui faisait figure d’eldorado vire à l’aigre.
Pour conserver l’un de ses plus rentable contrat africain, Orange ex-France Telecom, s’est livré à des forfaits, pas seulement téléphoniques … Là il ne s’agit pas de panne. L’histoire se passe en Guinée Equatoriale, petit Etat pétrolier. En 1984, la dictature au pouvoir (toujours dirigée pas Teodoro Obiang) désigne France Telecom comme seul opérateur privé du pays, les militaires percevant 60% des profits réalisés.
Déjà sur le grill à Malabo, la filiale de France Télécom-Orange est visée par plusieurs plaintes au pénal à Paris.
Au moment où les activités de Getesa, filiale de France Télécom-Orange en Guinée équatoriale, se trouvent en mauvaise posture dans ce pays (LC n°632), cinq de ses anciens ou actuels salariés sont sous le coup d’une plainte, en France, pour viol sur mineure et entraves à la saisine de la justice.
Agissant au nom de la famille de la famille d’une mineure équato-guinéenne, l’avocat français Norbert Tricaud a déposé, le 19 avril, auprès du procureur de la République de Paris, François Molins, una plainte pour viol visant un ex-cadre de France Télécom-Orange, ainsi que quatre hauts responsables du géant de la téléphonie, accusés, quand à eux, de complicité et de non-dénonciation de crime. Un arrangement, conclu en mars 2008, avait conduit à la reconnaissance de paternité de la fille née de cette relation, un an plus tôt, et au versement d’un dédomagement financier. Soucieuse de sauvegarder son image dans un pays où opère sa filiale africaine la plus rentable, France Télécom s’était alors engagée à sanctionner l’employé incriminé. Vaine promesse: l’intéressé a regagné son bureau de Malabo, avant de prendre la direction de la société de génie civil CGC, prestataire de son ancien employeur. La bienveillance dont il bénéficie paraît d’autant plus insolite que dans le temps, la maison mère a « lâché » un autre cadre condamné – abusivement -par la justice locale. Lequel cadre, Yves Garcia, avait oeuvré à la conclusion de l’accord amiable mentionné plus haut …
Contraint de se défendre seul car lâché en rase campagne par la direction de France Télécom (FT), déterminée à ne faire aucun bruit autour de cette affaire, Yves Garcia a fait appel à l’avocat Norbert Tricaud (Cabinet Warwick Legal & Moore Stevens) pour contre-attaquer dans le litige l’opposant à l’état équato-guinéen. Ancien cadre supérieur détaché auprès de Getesa, opérateur de téléphonie historique à Malabo et propriété du groupe français (40%) avec l’Etat équato-guinéen (60%), Yves Garcia a été condamné par contumace, le 13 septembre 2011, à trois ans et quatre mois d’emprisonnement par la chambre pénale de la Cour suprême de Guinée équatoriale (LC n°622). Avec deux autres responsables de FT, il est accusé d’avoir détourné plus de 17 millions €. Me Tricaud pointe de nombreuses irrégularités. Le fait que son client n’ait jamais été informé de cette procédure n’est pas la moindre … L’avocat, qui évoque une « escroquerie judiciaire », s’est d’ores et déjà opposé à la décision de la Cour Suprême. Il attaquera ensuite sur le fond. La somme que les cadres français sont supposés restituer correspond au montant des dommages et intérêts que France Télécom s’apprête à demander à l’état équato-guinéen devant la justice arbitrale internationale dans le cadre d’un différend avec Malabo. Curieux non ?
Stéphane Richard, le patron de l’opérateur français de télécommunications Orange, a fait de l’Afrique une vraie priorité pour ses actions de développement et d’investissement à travers le programme « Conquêtes 2015 ». Adopté l’an dernier, ce plan d’action doit parallèlement permettre de « faire évoluer la gestion des ressources humaines » en interne. Or, sur le sol africain, cette politique semble loin d’ateindre ses objectifs. Focus sur la Guinée équatoriale.