L’ancien responsable de la sécurité élyséenne comparaît le 19 novembre pour avoir détenu deux documents secret défense
Parmi les milliers de documents ultraconfidentiels conservés par le préfet Prouteau dans un box de Plaisir (Yvelines), seuls deux lui vaudront d’être jugé le 19 novembre, à Versailles, pour « recel de documents présentant un caractère de secret de défense nationale ». Le 19 février 1997, le juge Jean-Marie Charpier perquisitionne le box de l’ancien patron de la cellule élyséenne, en présence d’un haut fonctionnaire de la DST, Jacky Debain. Ils découvrent un véritable capharnaüm, mêlant souvenirs personnels, objets divers – un gilet pare-balles, un revolver Manurhin, des pièces détachées de R 25 – mais, surtout, 8 cantines numérotées et verrouillées.
A l’intérieur, des dossiers dont les étiquettes rappellent tous les épisodes chauds et les coups tordus des années 80: Action directe, Arménie, Carlos, Liban, Corse (opérations « Tapis volant » et « Soleil »), Coral-ballets bleus, Curiel, Tapie, Luchaire… On y trouve aussi des rapports des Renseignements généraux, des liasses d’ « interventions », des cassettes audio et vidéo et des centaines de notes adressées à François Mitterrand – et révélées par L’Express (n° 2387, le 3 avril 1997) – qui prouvent que le président de la République était au courant des écoutes téléphoniques pratiquées par la cellule de l’Elysée. Cette masse de documents ainsi que des registres d’écoutes sont alors transmis au juge Jean-Paul Valat, qui instruit toujours ce dossier.
Mais la DST a gardé par-devers elle quelques pièces qu’elle estime être couvertes par le secret défense. Saisi par le juge Charpier, le Premier ministre de l’époque, Alain Juppé, demanda une expertise à Paul Bouchet, président de la Commission nationale des interceptions de sécurité. Ce dernier estime que seules deux pièces sont frappées du secret défense: la retranscription d’un entretien téléphonique dans laquelle il est fait état d’un certain « Gilles » et un fax qui révèle les procédures de fonctionnement des écoutes administratives. Mais, paradoxalement, le contenu de ces deux pièces ne pourra être évoqué au cours du procès du 19 novembre, alors qu’elles constituent le cœur de l’accusation. Une curiosité de droit que ne manquera sans doute pas d’exploiter Me Francis Szpiner, l’avocat du préfet Prouteau. Ce dernier, amer, pourrait, pour se défendre, rappeler que le système des écoutes remontait toute la hiérarchie jusqu’au plus haut sommet de l’Etat.
Par Dupuis Jérôme, publié le