La Dépêche du Midi Témoignage au bout de l’horreur

Attention: documentaire coup de poing. Il y aura en bas et à droite de l’écran, un petit triangle sur fond orange. Cruelle ironie: ce sigle signifie « accord parental indispensable ». Et il sera question de ces parents ou de ces adultes qui abusent des enfants. Pire, qui les prennent pour objet de soumission et de torture…

On évoquera l’affaire Dutroux. De ce qu’elle sera devant un tribunal. De ce qu’elle aurait pu être.

Le témoignage recueilli par Patrick Benquet fait froid dans le dos. Tant par la distance clinique que semble observer Régina que par les horreurs qu’elle décrit.

Le plus terrible, c’est sans doute, c’est qu’il est des gens pour ne pas la croire. Mais c’est sans doute parce que l’abominable plonge ici dans l’indicible, parce que son histoire est, au sens littéral, incroyable, que se déclenche la cécité des lâches.

Ouvrons les yeux. Ecoutons-là.

Patrick Benquet, vous avez réalisé Témoins X1: comment avez-vous été amené à travailler sur ce sujet?

Patrick Benquet: France 3 désirait que l’on revienne sur l’affaire Dutroux. Quant à moi, je n’avais pas très envie de réaliser un sujet sur la pédophilie, c’est un thème trop dur.

Et puis, je me suis quand même intéressé à la question et sur internet, j’ai découvert l’interview donnée par Régina dans un quotidien belge. J’ai trouvé ses propos d’une intelligence incroyable, la façon dont elle parlait témoignait de beaucoup de subtilité, d’intelligence… Alors, je me suis dit qu’à travers elle, il serait possible de parler de cette affaire, évoquer ces choses terribles. Car là, on est bien au-delà de la pédophilie: on est dans des affaires de meurtres d’enfants

Quelle est l’histoire de Régina?

C’est l’histoire d’une jeune fille qui regarde la télévision. On y montre l’arrestation de Marc Dutroux, la découverte de deux jeunes filles séquestrées. Immédiatement, elle dit: Dutroux, je le connais!

Pour le juge, il y a un réseau derrière cette histoire. Il lance un appel à témoin. Régina va accepter de raconter.

L’affaire est énorme. Trente policiers travaillent dessus. Ils découvrent l’ampleur du réseau et surtout l’implication de personnalités importantes.

Mais le juge est dessaisi, les policiers suspectés, traînés dans la boue… Régina va se sentir abandonnée. C’est alors qu’elle va se décider à témoigner, petit à petit, jusqu’à le faire à visage découvert.

Et là, il y a eu une campagne de presse visant à la faire passer pour folle…

En Belgique, le témoignage de Régina divise l’opinion?

En Belgique, l’affaire Dutroux est un tel choc que les gens se divisent entre ceux que l’on appelle les « croyants » et les « incroyants ».

Pour moi, elle n’invente rien et je suis persuadé de sa sincérité. Il n’y a rien d’étonnant à ce que Régina commette des petites erreurs. Ce qu’elle a vécu est tellement insupportable qu’elle a forcément des séquelles qui se traduisent par des approximations. Elle a été abusée pour la première fois à l’âge de trois ans! N’oublions pas qu’elle a suivi une psychothérapie pendant 5 ans.

Pour vous, l’affaire Dutroux cache un scandale que l’on veut étouffer?

Mon propos n’est pas de démontrer cela. Il est simplement de restituer le témoignage de Régina qui, en lui-même, est terrible. Mais comment expliquer que cet homme disposait de quatre maisons, toutes avec des caves aménagées pour séquestrer des personnes? Cela suppose un réel niveau d’organisation et des soutiens. Voilà qui pose, pour le moins, des questions.

Recueilli par Dominique DELPIROUX.

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